message de l' Intersquat : Le 104 occupé
Un autre 104 est possible.
Journal d’inquiétude
d’une préoccupation citoyenne au 104.
Etendues de nos désirs communs : nous sommes des citoyens qui attendons d’un établissement artistique public qu’il s’affirme comme un lieu d’utopies actives, comme un lieu de vie, de fêtes, de fabrique d’hospitalités en tout genres.
Etendues de la vacance des lieux : nous constatons aujourd’hui que les promesses du 104 sont en déroute, que sa direction est démissionnaire, que son dispositif sécuritaire est surdimensionné, qu’en lieu et place de ce qui devait faire espace public rugit un courant d’air terrifiant.
Etendue du gouffre financier : nous savons combien l’argent public a filé là, entre les doigts d’une machine administrative et d’un bâtiment vorace, sans que de la dépense quelque trace manifeste ait fertilisé dans la ville.
Nous avons mesuré des
étendues, et nous sommes retrouvés en état de préoccupation.
A l’initiative de la revue Mouvement, nous nous sommes exposés là, aux yeux d’une administration intérimaire et néanmoins dubitative, pour faire écho à ces étendues, pour faire écho au vide alentour.
A l’initiative de chacun, nous avons échangé des états d’inquiétudes et de désirs, pour confirmer ainsi que nous veillons, et que nous re-veillerons, pour enfin, espérons-nous, réveiller les lieux.
A l’initiative de tous, nous avons décidé d’occuper les innombrables espaces publics délaissés ici pour affirmer, du haut d’une certitude acquise de nos compétences de citoyens, qu’un autre 104 est possible.
Nous avons entrepris de consigner des désirs, et listé des projets que nous voulons réaliser là, à la main. Pour faire obstruction aux courants d’air et ouvrir la rue, cette étendue invraisemblable qui relie rue de Curial et rue d’Aubervilliers. Nous avons ainsi écrit :
Fabriquer les traces
de ce qui s’œuvre ici, repenser la notion de résidence artistique et la faire
au pied de la lettre ; faire se réunir là les associations du quartier et
offrir pour cela un lieu de dialogue et de délibération ; faire
hospitalité là au point de construire un morceau de ville pour ceux qui la font
mais ne peuvent y vivre ; faire 104 morceaux de cet établissement démesuré
dont la politique ne peut alors se concevoir à hauteur d’homme ;
construire les maisons donnant sur cette rue la sécurisant par là-même, et
permettant d’économiser les sommes monumentales réservés au poste
sécuritaire ; élaborer les conditions de la réappropriation d’un espace
public, de deniers publics, de désirs publics, d’aventures publiques ;
créer les outils de la permanence d’une veille citoyenne ; faire une
antibrocante consistant à appeler la population alentour à venir déposer là un
objet, un trésor, et ainsi à prendre part au lieu ; organiser un festival
clandestin sans déranger, dans les interstices des espaces, dans les vides de
la programmation, dans les doublures, dans les ourlets, dans les chicanes ; et
continuer la liste.
Afin de continuer
cette liste, nous poursuivons cette occupation et demandons simplement à la
Ville, pour laquelle nous oeuvrons ainsi, qu’elle consente à nous ouvrir les
lieux, à nous offrir ici l’hospitalité, quelques chaises et quelques tables,
pour qu’en l’occupant, nous nous occupions aussi des lieux. Qui le méritent.